« Le voyage de Ricky », l’histoire d’un moineau qui se prend pour une cigogne

Image extraite du film Le voyage de Ricky.
© 2017 Knudsen & Streuber Medienmanufaktur / Ulysses Filmproduktion / Walking the Dog / Mélusine Productions / Den Siste Skilling / Paradis Films Distribution

Reza Memari, le scénariste du film Le voyage de Ricky, nous raconte l’écriture du scénario intimement lié à son histoire personnelle. 

Un moineau qui se prend pour une cigogne – comment avez-vous eu cette idée ?

Il y a une dizaine d’années, j’étais dans une zone piétonne à Munich, et je nourrissais des moineaux qui essayaient de chiper de la nourriture. J’ai levé la tête et j’ai vu un vol de canards dans le ciel, ils allaient vers le sur, alignés en un V parfait. Je me suis demandé pourquoi les moineaux ne migraient pas en hiver. C’est quand même injuste ! C’est alors qu’est apparu Ricky dans mon esprit. J’ai tout de suite imaginé un petit moineau en train de râler « C’est pas juste ! ». C’est comme ça que toute l’histoire a commencé.

Cela ressemble un peu à votre histoire personnelle, non ?

En effet. Mes parents ont fui l’Iran à la révolution et se sont installés dans un village de Bavière. Mon père me répétait que je devais m’intégrer. Un peu à l’image de Ricky, c’est vrai, j’étais le nouveau venu qui attirait l’attention car j’étais différent. De même que Ricky veut prouver à son père adoptif Claudius qu’il est une vraie cigogne, je voulais montrer au mien que j’étais à la hauteur. Il est fier de moi aujourd’hui mais il a longtemps trouvé ridicule l’idée que moi, je puisse faire un film d’animation. Inutile de vous dire que cela n’a fait qu’amplifier ma motivation. Notre productrice Kristin Knudsen et moi-même avons souvent eu l’impression d’être nous aussi des moineaux audacieux en train de tenter l’impossible. L’histoire reflète certainement toutes les années que nous avons vouées à ce projet.

La chouette Olga ne serait-elle pas la véritable star du film ?

Dans la toute première version du projet, Ricky était élevé par une famille de chouettes et il était le demi-frère d’Olga ! Cette version de l’histoire aurait imposé qu’il l’abandonne. Elle était déjà un personnage si attachant que nous voulions vraiment la garder sur l’ensemble de l’intrigue. De toute façon, les chouettes n’étaient pas très représentatives de l’image qu’on a d’un oiseau migrateur… et puis, la différence de taille entre un moineau et une cigogne était beaucoup trop drôle ! Alors Olga est devenue la nouvelle meilleure amie de Ricky. Toute l’équipe l’a immédiatement adorée : elle est à la fois coriace, hors de commun et adorable. Je suis très impatient de découvrir la réaction du public lorsqu’il va la rencontrer, avec son ami imaginaire Oleg bien sûr.

Vous n’avez jamais été tenté de montrer cet ami imaginaire à l’écran ?

Il apparaissait dans une scène où Olga fait un rêve. Mais finalement nous l’avons écartée, pour que chaque spectateur puisse se faire sa propre idée de ce personnage. Le montrer à l’écran aurait mis un frein à l’imagination du public. Et puis nous avions aussi envie de garder une part de mystère. Oleg existe-t-il réellement ? Chacun à sa réponse.

D’où est venue l’inspiration concernant Kiki la perruche ?

J’imaginais un comédien de théâtre vieillissant et avec une voix haut perchée. C’est une diva au masculin mais il a bon cœur finalement. Nathan Lane dans The birdcage m’a beaucoup inspiré.

Quel a été le principal défi technique du film ?

Quand nous avons commencé la pré-production, les moyens techniques étaient moins avancés qu’actuellement. A l’époque, on nous a dit : « Animer des plumes, c’est mission impossible ! ». C’était trop compliqué et bien trop cher. En l’espace de quelques années, les possibilités techniques se sont énormément développées et le temps a joué pour nous. J’ai même pensé que dans mon prochain film je pourrai leur faire animer les limaces. En réalité, les plumes sont encore une animation très compliquée. Pour Olga par exemple, il a fallu animer chaque plume une à une, à 24 images-seconde. L’autre grosse difficulté tenait au fait que Le voyage de Ricky est un road-movie qui nous entraîne en Europe et en Afrique, avec des décors variés et des lieux qui contiennent souvent une foule de personnages. Nous avions des forêts, des villages, des villes, des paysages, du ciel, des nuages, de la pluie… Autant de lieux différents, c’est tout autant de visuels à créer.

Y a t-il des difficultés particulières à écrire un film destiné à toute la famille ?

Il est essentiel d’inclure plusieurs niveaux de lecture et de sous-texte, pour que les plus grands et les adultes s’amusent aussi. Les pigeons loufoques connectés sur leur fil en sont un exemple. Les enfants rient des oiseaux qui se contractent avec les ondes téléphoniques, tandis que les plus grands comprennent qu’il s’agit d’une parodie des réseaux sociaux. J’ai aussi tenu à ajouter des moments plus sérieux, avec un enjeu réel et des conséquences – notre Ricky enchaîne les chutes et les nouveaux départs après tout. Il est toujours très important que les héros soient confrontés à des difficultés réelles, du danger, et passent sans cesse par toutes sortes d’émotions. Il ne faut pas avoir peur du drame, même dans un divertissement familial.

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