« Jack et la mécanique du cœur » : les doubleurs

Image extraite du film Jack et la mécanique du coeur.
© 2013 EUROPACORP – DURAN – FRANCE 3 CINEMA

Olivia Ruiz, Grand Corps Malade et Jean Rochefort racontent leur rencontre avec le réalisateur et l’univers magique du film Jack et la mécanique du cœur.

OLIVIA RUIZ

COMME UNE ÉVIDENCE

« La mécanique du cœur s’inspire de notre histoire avec Mathias, il lui a donc sans doute paru comme une évidence de donner ma voix au personnage de Miss Acacia : j’ai d’abord vu le livre se construire jour après jour, puis le disque s’élaborer à partir de bribes de chansons et de textes. Même si c’est bien entendu le ‘bébé’ de Mathias, c’est aussi un peu le mien, dans la mesure où j’ai regardé ce projet s’épanouir étape par étape ».

ADAPTATION NOVATRICE

« Ce qui m’a vraiment enthousiasmée dans l’adaptation, c’est qu’il ne s’agit pas exactement de la même histoire que le livre : le dénouement n’est pas le même et les mondes explorés par le film sont, eux aussi, différents. Pour moi, c’est très important car les gens qui ont aimé le livre n’auront pas le sentiment d’une redite, tandis que ceux qui apprécieront le film auront sans doute envie de découvrir le bouquin. Tout comme Tim Burton dans Charlie et la chocolaterie donnait des infos sur le père de Willy Wonka qui ne figuraient pas dans le livre de Roald Dahl, Mathias a enrichi l’intrigue de La mécanique du cœur ».

SE FONDRE DANS LE PERSONNAGE

« Au départ, je me demandais comment j’allais m’y prendre pour aborder ce personnage qui a beaucoup de moi, sans être vraiment moi… Mais comme, dès l’écriture, Mathias mettait mon visage sur l’interprétation et la voix, je me suis fondue dans le personnage, tout en espérant que j’arrive à lui offrir ce qu’il avait fantasmé. Finalement, tout s’est passé naturellement ». 

UNE FEMME AMOUREUSE

« À mi-chemin entre la Femme Chocolat et la Flamme à lunettes, Miss Acacia est marquée au fer rouge par son histoire familiale. Elle a constamment besoin de se protéger, si bien qu’elle peut sembler presque pète-sec mais elle peut aussi se révéler très généreuse et se donner à 100 %. C’est un personnage assez complexe, dont on sent qu’elle s’est fixée une ligne de conduite et qu’elle n’aimera plus jamais quelqu’un comme elle a aimé Jack : c’est presque obsessionnel, tout en étant assez carré et rigoureux ».

ÊTRE SOI-MÊME

« La seule indication que Mathias m’ait donnée pour le doublage, c’était ‘Sois toi-même’. C’est sans doute l’exercice le plus difficile que j’aie dû affronter. Récemment, j’ai doublé une petite tortue dans un autre film d’animation, mais j’étais à l’aise car le personnage n’avait rien à voir avec moi et c’était donc un travail distancié. Ici, je ne pouvais pas me permettre de prendre un tel recul, puisque Miss Acacia me ressemble beaucoup ! J’ai seulement accentué la dimension affectueuse du personnage pour la rendre encore plus attachante ».

AVEC NATUREL

« Je n’ai pas du tout modifié ma voix, si ce n’est en adoptant un ton plus aigu dans les parties où Miss Acacia apparaît plus petite à l’image. Parfois, aussi, Mathias m’a demandé d’émettre de légers ricanements mais le plus souvent, c’est mon propre rire qu’on entend. Le fait qu’on utilise le ton de ma voix donne un rendu plus naturel au niveau du mouvement des lèvres et offre plus de place à l’interprétation, même si j’ai trouvé que c’était plus difficile que de travailler avec une bande rythmo. En revanche, ce qui m’a facilité la tâche, c’est d’avoir mon partenaire en face de moi, plutôt que de me retrouver enfermée seule dans une cabine, comme cela m’est arrivé. C’était notamment nécessaire pour la scène de la dispute qui, sans cette approche, n’aurait pas été aussi fluide ».

GRAND CORPS MALADE

EXPÉRIENCE INÉDITE

« Avant même d’avoir fini l’écriture du livre, Mathias m’a raconté l’histoire et m’a proposé le rôle de Joe. J’ai non seulement été emballé par ce conte féerique mais j’étais aussi tenté par l’idée de composer un texte à partir d’un ouvrage existant. C’était une expérience nouvelle et je n’ai pas hésité une seconde à donner mon accord. Ensuite, on a enregistré un disque et on a organisé un grand concert au Zénith avec presque tous les artistes de l’album. C’était un moment magnifique mais qui avait comme un goût d’inachevé : il nous manquait l’aventure du film d’animation… »

PAS SI MÉCHANT QUE ÇA !

« Mathias me voyait dans le rôle du méchant à cause de ma grosse voix. Mais très vite, il m’a expliqué que c’était un méchant de circonstance qui semble redoutable parce que le film adopte le point de vue de Jack. C’est un personnage beaucoup plus attachant et humain qu’il n’y paraît et qui, en outre, à une certaine classe et une bonne dose d’humanité. En voyant les premières images, je me suis rendu compte que c’était un beau gosse, un peu froid et dur : il est grand et élancé, avec un large front et des yeux bleus, il me ressemble un peu physiquement, sans être pour autant dans la caricature ».

ENTRE NATUREL ET COMPOSITION

« C’est grâce aux images que j’arrive à comprendre les intentions des auteurs et que je sais si Joe est plus ou moins doux ou en colère à tel ou tel moment. Mathias me donnait des conseils sur de tout petits détails, comme des intonations de voix : il fallait exprimer l’état d’esprit du personnage, tout en gardant un maximum de naturel. Il s’agissait donc de trouver le juste équilibre entre incarner Joe et rester moi-même. Pour y parvenir, on était constamment dans l’échange avec Mathias : il m’encourageait à prendre du recul par rapport à ses directions et à vivre les situations. Par exemple, lorsque Joe se fait crever l’œil, on ne peut pas se contenter de rester figé devant le micro – il faut interpréter la scène, comme si j’étais filmé ».

JEAN ROCHEFORT

RÉ-ENCHANTER LE QUOTIDIEN

« En découvrant le livre de Mathias Malzieu, et en lisant son scénario, je me suis dit que c’était formidable de pouvoir faire un film d’animation aujourd’hui sans effets spéciaux sophistiqués mais teinté d’un fantastique presque artisanal. Mathias – et Jack, son petit héros – tutoie la fantaisie et l’imaginaire avec facilité et générosité, ce dont nous manquons un peu dans notre quotidien, mais aussi dans les fictions qu’on a l’habitude de voir. J’ai été tellement touché par cette histoire que j’étais presque jaloux de ces personnages dessinés ! »

BRICOLEUR GÉNIAL

« Mon personnage, Georges Méliès, rencontre Jack par hasard et tombe en émerveillement devant son coeur-pendule, fabriqué à partir de pièces d’horlogerie. C’est grâce à cette découverte fantastique que Georges, bricoleur de génie, peut enfin mettre au point la caméra dont il rêve et rendre le mouvement suffisamment crédible pour répondre à son goût pour le fantastique. Il se lie d’amitié avec ce garçon qu’il entreprend de rendre heureux. Je crois que Mathias m’a confié ce rôle parce qu’il s’est dit que j’avais un certain penchant pour l’incongruité ».

COMPLICITÉ IMMÉDIATE

« Il faut dire que ma rencontre avec Mathias a été immédiatement affectueuse. À ma grande surprise, il m’avait demandé de participer à l’enregistrement de son album, puis de tourner le clip avec lui. Dès que je l’ai rencontré, il s’est produit une véritable alchimie et je me suis dit ‘Je ne vais pas perdre mon temps, je vais m’enrichir et peut être lui aussi s’enrichira-t-il à mon contact’. C’est donc une belle rencontre, heureuse et gratifiante ». « Pendant l’enregistrement, je me sentais en complicité et en osmose avec Mathias. Dans ces cas-là, j’aime bien me laisser aller au rire car je pense que c’est la meilleure façon de travailler. D’ailleurs, les consignes des deux réalisateurs étaient simples, claires et précises, sans digressions inutiles, ce que j’aime particulièrement. Quand on est en confiance, le mur générationnel s’effondre : je suis très sensible au fait d’avoir des amitiés avec des gens infiniment plus jeunes que moi et j’espère que cela durera le plus longtemps possible ».

ROSSY DE PALMA

PARFAITE ADÉQUATION

« Quand j’ai rencontré Mathias, il m’a avoué que, dès l’écriture du livre, il m’avait envisagée dans le rôle de Luna. C’est extraordinaire car, à l’époque, il ne se doutait même pas que je chantais. C’est une rencontre magique qui m’a émerveillée : Mathias est un énorme bosseur, constamment dans la créativité et plein d’amour ».

QUAND LA MAGIE OPÈRE

« La magie s’est poursuivie lorsque Mathias m’a confié un jour qu’il aimerait porter le livre au cinéma : je lui ai répondu que l’homme qui pouvait concrétiser son rêve était Luc Besson. J’ai trouvé magnifique que mon pressentiment ait été le bon ! Aujourd’hui, je ne peux que constater l’harmonie et la belle cohérence entre la musique, le livre et le film. Dès qu’on plonge dans cet univers, on a envie d’y rester et de ne surtout pas revenir à notre réalité ».

VAINCRE SA PEUR

« Ce qui m’a emballée dans le livre, c’est la métaphore de ce personnage qui a une horloge à la place du cœur et qui doit s’interdire de tomber amoureux. Car, quand on aime, on dépend de l’être aimé et on est un peu dépossédé de soi-même. Bref, on n’est plus totalement en sécurité. Mais la vie est faite de risques, si on est toujours prudent, on n’apprend jamais à se mettre debout et à se relever plus fort de ses erreurs. Si on a peur du monde, on se renferme et on se flétrit de l’intérieur. Je pense qu’il faut faire comme Jack : aller vers ce qui nous tient à cœur sans avoir peur de souffrir ».

VERS LA LUMIÈRE

« Luna, mon personnage, est une vieille tante espagnole, si bien que je n’ai pas eu à transformer mon accent ! C’est quelqu’un de joyeux, même si elle a une jambe de bois et qu’on sent bien qu’elle a souffert. Pour autant, elle ne laisse jamais la tristesse s’emparer d’elle et elle conserve un état d’esprit positif et lumineux. Elle est consciente qu’en se laissant assombrir, elle risquerait de disparaître dans les abîmes. Elle refuse de se prendre la tête : elle sait qu’il y a toujours moyen de s’en sortir et que, dans la vie, lorsqu’une porte se ferme, une autre s’ouvre. C’est une attitude qui vient de la matriarche qui est en elle ».

UN SON REBELLE

« Il s’agit de mon premier doublage d’un film d’animation et, au départ, j’étais sceptique sur ma capacité à trouver la voix de mon personnage. En général, je travaille de manière intuitive et si j’assume mes erreurs, j’ai tendance à penser que les bonnes décisions ne viennent pas de moi. Pour Jack et la Mécanique du Coeur, je voulais que Luna émerge d’elle-même, s’approprie ce qu’elle voulait de moi et choisisse les tessitures de ma voix qui lui conviennent le mieux. Le son est un élément très mystérieux : on essaie de l’apprivoiser mais il est rebelle. Parfois, une parole prononcée d’une manière ou d’une autre peut révéler des choses sur soi qu’on ne soupçonne même pas… »

BABET

UNE BELLE RENCONTRE

« J’ai rencontré Mathias à Montpellier par hasard, il m’a parlé de son groupe et m’a dit qu’il aimerait bien avoir du violon sur un morceau : c’est ce qu’on a fait et j’ai immédiatement trouvé des mélodies sur ses chansons. En peu de temps, j’ai rejoint son groupe : c’était très punk à l’époque et j’étais super heureuse de me retrouver au milieu de ces quatre garçons pleins d’énergie. On a vraiment grandi ensemble et je n’aurais jamais imaginé qu’on en arriverait là, quinze ans plus tard ! Aujourd’hui, Mathias a réalisé son film et je me rends compte que ses rêves se concrétisent les uns après les autres : il a toujours eu envie de faire du cinéma et je me souviens qu’à l’époque, il tournait tous les clips du groupe avec une caméra Super 8 ! »

PERSONNAGES DÉCALÉS

« J’interprète Anna qui est assez douce, rêveuse et naïve, qui se laisse porter par les situations. Tout comme Luna, c’est un personnage décalé, comme les aime Mathias. Je prête également ma voix à la femme à deux têtes, personnage hystérique qui vit dans son monde et dont Méliès tombe amoureux : elle lui mâchouille les moustaches et passe son temps à rigoler et à faire n’importe quoi ! C’est un personnage totalement déluré ».

Cet article pourrait vous plaire :

Partager l’article

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *